Un jugement est-il la proclamation d’une évidence ?
Juger est un acte grave qui requiert une éthique dont le juge doit se montrer digne. À cet effet, il étudie avec attention et sérieux les moyens avancés contradictoirement par les parties, les pièces, textes et jurisprudence cités. Sa liberté d’interprétation peut l’amener à être l’auteur d’une jurisprudence innovante, mais sans jamais statuer contra legem. Sa réflexion approfondie le guide sur le chemin d’une évidence dont émerge la décision ; il peut alors la motiver et ainsi éclairer le dispositif d’un jugement qu’il espère auréolé des couleurs du juste.
Quand le juge sait-il qu’il est juste ?
Lorsqu’en conscience il a écarté ses préjugés, allant parfois jusqu’à se déporter pour être en paix avec lui-même et donner à l’opinion l’image d’une justice impartiale.
Juger ses pairs, n’est-ce pas porter un jugement sur soi ?
Cette question met en lumière la spécificité des tribunaux de commerce. En effet, le juge consulaire est appelé à trancher des situations qu’il a connues ou aurait pu connaître. En jugeant ses pairs, il met sa propre expérience au service de son office et porte sans doute un jugement sur lui, car sa mission l’y invite
Quelle part donnez-vous aux verbes persuader et convaincre dans la formation de votre religion ?
La conviction agit sur l’entendement et le juge cherche les raisons propres à le convaincre. La persuasion qui parle au cœur y a cependant une place. Le droit et l’équité sont inséparables, la dimension humaine n’est jamais absente et l’adage « summum jus, summum injuria » de Cicéron ne doit pas être ignoré.
Jean-Bertrand Drummen
Président honoraire du Tribunal de commerce de Nanterre
Ancien Président de la Conférence générale des juges consulaires de France