La coopétition ou l’affectio societatis économique

La méditation apprend à s’exercer à la compassion, à ressentir, respecter et inclure les émotions d’autrui dans sa propre vie.

La méditation apprend à s’exercer à la compassion, à ressentir, respecter et inclure les émotions d’autrui dans sa propre vie.
 
Matthieu Ricard suggère de faire du xxie siècle un émissaire de la « banalité du bien » ; il enseigne à éprouver les joies de la coopération, du lien social et forme notre esprit à l’harmonie durable et la sobriété heureuse chères à Pierre Rabhi. À cet effet, l’empathie ne suffit pas ; il faut y adjoindre la chaleur humaine et la bonté.
 
 
“Il faut survivre comme des frères pour ne pas mourir comme des idiots.”
Martin Luther King
 
 
À l’échelle de l’économie, de nouvelles théories prônent un utilitarisme éthique et bienveillant.
 
Muhammad Yunus, prix Nobel de la paix 2006 a éradiqué l’héméralopie (incapacité de voir dans la pénombre) dont étaient atteints de nombreux enfants au Bangladesh en accordant des microcrédits pour financer l’achat, non des vitamines A nécessaires pour contrer la maladie, mais des sachets de graines à planter pour récolter les légumes en procurant les bienfaits.
 
Certaines multinationales soutiennent aujourd’hui ce nouveau mode entrepreneurial du social business pour favoriser l’accès à l’eau, l’hygiène, la santé publique ou l’environnement. Veolia Environnement a mené au Bangladesh un vaste projet pour assainir l’eau des puits contaminée par l’arsenic. Ainsi, la vente de bouteilles d’eau à un prix plus élevé à Dacca, capitale du pays, permet de financer le coût du traitement de l’eau de rivières fournissant l’eau à 2 villages.
 
Ni pertes, ni dividendes, tel est le principe gouvernant cette économie plus humaine, jugée assez rentable pour être pérenne si elle est libérée de la pression actionnariale. L’altruisme apparaît ainsi comme un utilitarisme éclairé et « mushotoku » (sans esprit de profit en langage zen) luttant contre les souffrances d’autrui qui nous sont épargnées ; l’objectif est de passer du calcul de notre intérêt en intérêt sans calcul, du miroir (je te donne SI tu donnes) à la réciprocité et ouvrir ainsi la voie à la « coopétition ».
 
À rebours de la tyrannie de l’argent, cet entrepreneuriat social restaure le lien entre les générations, vise à améliorer la vie plus qu’à la faire durer et surtout éloigner le spectre oppressant de la précarité.
 
 
“La terre n’est pas un don de nos parents, ce sont nos enfants qui nous la prêtent.”
Proverbe amérindien
 
 
Après les « Trente Flambeuses » d’une finance indécente et irresponsable croyant au mythe de l’autorégulation, émerge le financement 4P assis sur le « Principe du Partage des Profits et des Pertes » ; mode alternatif et mixte de financement, à mi-chemin du prêt et du capital-risque. Sa rémunération repose sur une participation mutuelle et contractuelle aux profits espérés ou pertes accusées.
 
Sans être philanthropique, cette innovation dessine la trame d’une économie nouvelle assise sur la confiance, portée vers l’investissement, favorable à une dynamique de croissance, tout en instaurant un lien réel entre charge financière et résultat de l’entreprise.
 
Pour échapper à un individualisme qui a montré ses limites, ces initiatives veulent promouvoir un avenir meilleur. Que l’homme soit bon par nature (Rousseau) ou grâce à la société (Voltaire), l’altruisme apparaît comme une forme d’empathie économique appropriée, un guide pour régir nos actes individuels ou collectifs afin qu’au lieu de l’asservir, l’économie redevienne au service de l’homme.
 
 
Jacques Varoclier